back into you

Debout dans son appartement, face à la fenêtre à l’ouest, Charlie attendait. Il attendait quoi? Que ce damné soleil se couche, évidemment. Il pensait l’avoir trouvée cette fois-ci. Il ne savait pas trop comment il avait fait pour se retrouver avec elle au Fangtasia la nuit d’Halloween, ni même pourquoi elle était partie comme ça sans qu’il n’ait pu dire quoi que ce soit, mais il savait que ce n’était pas du jeu. Elle n’avait pas le droit de foutre le camp dès que ça lui chantait pour éviter la confrontation. Ils n’avaient pas fini leur conversation de la nuit où ils s’étaient enfin fait face et cette conversation devait être terminée. Pour elle, pour lui, pour leur fils. Qu’elle soit maintenant un vampire, Charlie s’en fichait. Elle était là, quelque part, et c’était suffisant pour lui. Ce pourquoi, pendant des jours, il s’était employé à la chercher. Posant des questions un peu partout, fouillant des registres qu’il n’avait en théorie pas le droit de consulter. Il avait fait plusieurs maisons, manquant même de se faire tuer une fois ou deux, mais à défaut d’avoir été un bon chef de famille, l’écossais était un excellent chasseur et avait pu se dépatouiller de ces situations dangereuses. Cette fois-ci, il était presque sûr que c’était la bonne. Il devait juste attendre que le soleil disparaisse.

Et une fois que l’astre solaire se coucha, plongeant la ville dans une pénombre qui devenait de plus en plus noir au fil des minutes qui passaient, Charlie quitta son logement, un air déterminé trainant sur son visage. Depuis son altercation avec Pandora, l’ancien soldat avait toujours ce questionnement qui lui trainait quelque part au fond de la tête. Kyle était-il là? Le suivait-il partout où il allait depuis toutes ces années? Si c’était le cas, le fantôme de son petit bonhomme avait vu de nombreuses choses qu’il n’aurait jamais dû voir. Depuis que la nécromancienne lui avait révélé la présence de son fils près de lui, pourtant, l’écossais faisait des efforts pour se comporter un peu plus comme le père qu’il était autrefois.
Entre pour ça, Charlie devait la retrouver. Il devait retrouver Neilina, qu’ils se parlent. Si leur fils était vraiment là, quelque part, à les observer, il méritait de voir ses parents se parler, chercher une solution… ou même un espoir ténu. En tout cas, Charlie voulait y croire. Maintenant que sa femme avait refait surface, il avait dû mal à accepter le fait d’être loin d’elle en sachant pertinemment qu’elle se trouvait dans la même ville que lui. Il l’avait laissée une fois, il ne ferait pas encore cette erreur, ça non.

Roulant plusieurs minutes, l’ancien James Bond se gara le long du trottoir tout juste devant l’adresse suspectée d’être la bonne. Une maison qui respirait un luxe qu’il n’aurait jamais pu lui offrir du temps qu’ils étaient encore une famille. Maintenant que le chasseur n’avait pratiquement plus un sous en poche et qu’il commençait à se demander comment il allait payer sa pitance dans quelques semaines, ce genre de résidence était encore moins dans ses moyens. Mais peu importe, il trouverait une solution pour ça, il en trouvait toujours. En attendant, il fallait surtout s’assurer qu’il l’avait enfin trouvée. Arrêtant le moteur, sortant de sa bagnole d’occasion, l’écossais s’avança jusque sur le porche pour sonner. L’attente lui sembla longue, beaucoup trop longue, alors qu’elle ne dura qu’une minute à peine. Puis, un homme d’un certain âge ouvrit la porte.

▬ Vous désirez?
▬ Je cherche cette femme.

Montrant une vieille photo usée par le temps et un mode de vie plutôt agité, Charlie désigna la femme en question qui, sur la photo, tenait un gamin en bas âge dans ses bras. L’homme ne dit rien, mais rien qu’à son expression, le grand brun devina qu’il avait enfin frappé à la bonne porte. Elle était ici. Ne se gênant donc absolument pas pour entrer, il poussa le propriétaire de la maison sur le côté pour libérer le passage, rangeant en même temps la photo dans la poche intérieure de son blouson.

▬ Mais qu’est-ce qui vous prend! Vous n’avez pas…
▬ La ferme!

Qui que soit cet homme, Charlie s’en fichait complètement. Qu’il appelle les flics pour invasion de domicile était bien le dernier de ses soucis. Gérer la police était sans aucun doute bien moins difficile que de gérer un vampire qui veut vous déchirer le cou!

▬ Neili? … Je sais que t’es là.

Pour changer, elle n'avait pas cesser de penser à Charlie depuis... Bon, depuis toujours mais aussi depuis cette fête au Fangtasia ou à peine arrivée il lui semblait qu'elle avait été droguée puisqu'elle ne se souvenait plus de rien mais... Il lui semblait aussi que Charlie était présent. Comme une forte impression qu'elle avait passé tout son temps avec lui et qu'elle l'avait redécouvert. C'était vraiment très étrange car elle ne pouvait se baser sur aucun de ses souvenir, juste une forte impression... Du coup, elle n'avait cessé de penser à lui mais cette fois, elle n'avait pas tenté de le revoir. Non. Elle s'était contenté de l'imaginer mais elle ne savait plus trop si le fait de l'avoir revu était quelque chose de bien ou non. Elle n'était plus sure de rien. Enfin si, elle était sure qu'elle l'aimait toujours mais de là à savoir si renouer une relation était une bonne idée. Non. Elle restait donc loin de lui, passant son temps avec Henry, s'emmerdant comme un rat mort en sa compagnie, ne désirant qu'une chose : Le saigner pour qu'il la laisse tranquille. Mais il était une parfaite couverture. Il lui "offrait" un toit et un garde manger parfait! Comment pourrait elle le laisser? Impossible et pourtant, D... qu'elle en rêvait.

Elle avait très mal dormi cette journée là, sentant que quelque chose était bizarre... Les femmes et leur sixième sens hein?
A peine était elle levée et le soleil couché que quelqu'un frappa à la porte. Elle qui se trouvait à l'autre bout de la grande demeure n'avait pas prêté attention à la venue d'un invité jusqu'à ce qu'elle entende des éclats de voix... Charlie? Qu'est-ce qu'il fichait ici? Ici c'était chez elle! SON endroit rien qu'à elle, il n'avait pas le droit d'être là et de s’immiscer comme ça dans sa vie! Non, certainement pas! Avant, oui, mais plus maintenant! Maintenant elle était une vampire qui avait besoin de son vieux chnoque pour se nourrir. Elle n'était plus vraiment sa femme, fin, légalement si et sentimentalement aussi mais vampiriquement non! En plus elle mourrait de faim, elle n'avait même pas eu le temps de prendre un petit casse croûte que Charlie était sur le pas de la porte. Non, à l'intérieur de la maison hurlant son nom!
*Oh mon D ieu, Oh mon D ieu, Oh mon D ieu!!!!* Elle avait rapidement enfilé un peignoir en soie rose, privilège donné à la "femme" d'une vieux bonhomme riche (elle avait tout plein de super cadeaux dans sa chambre! Celle dans laquelle elle ne dormait pas mais où elle se sentait un peu comme chez elle. Des bijoux, des toilettes... Plein de bagues. Henry s'obstinait à lui acheter des bagues alors qu'il savait qu'elle ne retirerait jamais celles qu'elle avait déjà et qui datait d'une époque lointaine...). Vieux bonhomme riche qui allait finir par lui poser des questions! Elle ne voulait pas qu'il soit au courant de sa vie passée!! Il avait surement des doutes mais elle ne voulait pas qu'il connaisse le moindre détail! Elle fila donc en direction des voix et se retrouva face à Charlie. Elle le foudroya du regard et se planta devant son humain.
▬ Henry, tout va bien. Ce monsieur est le plombier, il vient réparer ma baignoire. On va monter et tu ne vas plus te poser aucune question, n'est-ce pas trésor? Pratique d'être un vampire mais à force de lui faire subir ce genre de petits traitements, Henry allait devenir totalement gaga. Elle se retourna ensuite vers Charlie et avança, ouvrant la marche.
▬ Suis moi. Pourquoi était il là?! Elle qui prenait du temps pour elle, se poser les bonnes questions savoir si tout ça était bon ou non pour elle et surtout pour Lui. Savoir si cela n'allait pas raviver des souvenirs douloureux... Elle ne voulait pas qu'il souffre, elle l'aimait encore trop pour cela mais elle n'aimait pas qu'il arrive comme ça sans prévenir! Elle ne l'avait jamais suivi jusque chez lui après tout! Oui elle était à lui mais quand même!

Si au départ Charlie se fichait complètement de ce type chez qui vivait sa femme, maintenant qu’elle était devant eux et qu’elle le faisait passer lui pour un vulgaire plombier aux yeux de cet homme, il ne pouvait s’empêcher d’être jaloux. Lui, celui qui était encore à ce jour le père de son fils, elle le faisait passer pour le plombier! Il y avait là de quoi se sentir plutôt vexé et nous pensons que peu d’entre vous trouverons de quoi rendre ce sentiment injustifié. Ce type n’était rien sinon l’image d’un homme riche et sans personnalité. Rien qu’à la baraque et son attitude, l’écossais pouvait sentir qu’il se définissait par ses possessions et rien de plus. Plutôt décevant. Charlie n’imaginait pas que sa femme puisse être à ce point superficielle. La suivant tout de même sans vraiment porter attention à où ils allaient, le brun garda le silence pratiquement une minute entière avant de finalement laisser échapper son bougonnement de grincheux qui venait de se faire enlever sa bière et ses chips avant d’avoir terminé.

▬ Le plombier, charmant…

Regardant autour de lui, il décida qu’il n’aimait pas cet endroit. Trop chargé pour être personnel, trop riche pour être vrai. Et il décida qu’il n’aimait pas non plus la marionnette qui était restée au rez-de-chaussée. Certes, sa femme s’en servait visiblement que pour vivre confortablement, usant sûrement de l’hypnose plus qu’il n’en était nécessaire, mais malgré le fait que ce pauvre type ne soit qu’un pantin… Charlie n’aimait pas ça!

▬ Et lui il est quoi? L’électricien?

Roulant les yeux, l’ancien soldat regretta pourtant sa remarque dès l’instant où elle avait quitté sa bouche. Il l’avait cherchée et il était venu s’insurger dans « sa » demeure parce qu’ils devaient parler. Déclencher une guerre à cause d’un garde-manger n’était pas l’idéal pour démarrer cette discussion sur de bonnes bases. Mais que voulez-vous, un homme était un homme et un homme un poil orgueilleux et jaloux ne pouvait pas passer ce qu’il venait de voir sous silence.
Cependant, Charlie usa d’un brin de sagesse, retenant soigneusement la suite de ses bougonnements qui auraient ressemblé à un « je savais pas que t’aimais les papys » et autres conneries du genre qui n’auraient fait qu’aggraver la situation davantage. Inspirant profondément pour ensuite expirer tout aussi calmement, l’ex James Bond venait de repousser mentalement l’autre type du tableau. Il ne savait pas encore s’il y reviendrait plus tard – après tout ce n’était pas franchement une bonne idée malgré son ressentiment il le savait très bien – mais pour le moment, papy n’était pas la préoccupation à l’ordre du jour. Il fallait qu’ils discutent et que cette discussion aille au bout des choses. Quitte à faire mal – l’écossais n’était plus à ça près de toute façon – il fallait crever les abcès une fois pour toute autrement Charlie sentait qu’il finirait réellement par étouffer. Tout ce temps à tout garder en lui… Là il ne s’agissait pas d’un simple ami qui lui martelait la cervelle à lui dire que parler lui ferait du bien et blablabla. Il s’agissait de sa femme, devenue vampire à cause de lui. Se morfondre n’aurait rien changé, mais faire face à la victime de sa naïveté et de sa stupidité, c’était une autre histoire.
Les yeux soigneusement dirigés vers le sol, l’écossais attendit encore de longues secondes avant de les lever sur elle. Magnifique visage de porcelaine. La seule chose qui avait changé, c’était son teint qui était là pour lui rappeler que sa femme n’était plus tout à fait en vie. Mais pourquoi s’en soucier? Lui-même aurait dû être mort tant de fois et il ne pensait plus à l’avenir depuis longtemps. Alors pourquoi s’inquiéter de lui qui continuerait à vieillir et elle non quand il avait la chance de se trouver devant elle à nouveau?

▬ À quoi on joue Neili? Je t’aime, tu m’aimes et chacun marche dans sa direction? C’est ridicule.

Faisant bien évidemment référence à leurs retrouvailles qui furent pour le moins émouvante, Charlie avait besoin de comprendre. Il lui avait dit qu’il l’aimait. Elle lui avait répondu la même chose. Ensuite elle avait dû fuir le levé du soleil et puis plus rien? Non, ça ne pouvait pas se passer simplement comme ça. D’accord il avait détruit sa famille, son fils était mort, sa femme vampirisée et lui devenu une véritable épave suicidaire. Mais ils avaient une seconde chance maintenant, pas vrai? Il ne voulait et ne pouvait le percevoir autrement que comme ça. Trop longtemps il avait été séparé d’elle, peu importe ce qui avait changé maintenant, il était prêt à faire avec rien que pour cette seconde chance.

▬ Je peux pas te laisser partir… pas encore.

Cette éventualité le tuerait, tout simplement. Chaque jour pendant sept ans, il avait cherché une raison de vivre cette journée. Après ça, plus aucune raison ne lui serait suffisante, ça il en était certain.

Ce n'était pas vraiment comme ça qu'elle s'imaginait leurs prochaines retrouvailles en fait. Charlie arrivant à l'improviste, sonnant à sa porte et se voyant accueillit par Henry, tout étonné et complètement à côté de ses pompes... Plus ou moins comme d'habitude. Oui, il n'était plus tout jeune et voir tout à coup un jeune homme forcer l'entrée de chez lui, tenant dans sa main une photo de sa jolie vampire en compagnie d'un enfant et de l'intrus lui même, n'allait pas l'aider à reprendre ses esprits. Pour ce qui était de Nei, elle était agacée. De quel droit Charlie s’immisçait il ainsi dans sa vie? Oui, c'était son mari mais il n'avait pas à agir comme ça, chamboulant sa nouvelle existence. Elle n'avait jamais aimé qu'on lui donne des ordres ou qu'on essaie de la pousser à faire quelque chose. Qu'elle ait ou non eu envie de faire cette dite chose. Nei était une femme libre. Une femme chérie à son mari qui en son temps faisait tout pour lui mais pour ça il fallait qu'il ne demande rien! A la maison, elle faisait tout. Quand Charlie était là elle ne voulait pas qu'il se fatigue avec des tâches qui pourraient lui faire manquer du temps avec son fils ou elle même, du coup, elle faisait tout. Quand il n'était pas là et bien... Elle continuait à tout faire, évidemment. Bref, pas d'ordre! Pas de gens qui arrivent à l'improviste, pas même son mari! Elle ne voulait pas qu'il surgisse ainsi de nulle part sans qu'elle ait pu réfléchir à ce qu'elle allait lui dire. Sans qu'elle soit prête à le rencontrer à nouveau! Évidemment, elle s'était joué la scène de leur nouvelle rencontre des centaines de fois et bizarrement, elle ne l'imaginait jamais débouler dans son grand hall et accueillit par Henry à qui elle devrait encore faire oublier des choses. Si elle continuait il allait devenir complètement gaga! Non pas qu'elle en avait réellement quelque chose à faire mais quand même. C'était un homme d'esprit, un homme instruit, elle aimait bien parler avec lui. Elle aimait bien aussi lui pomper du sang mais cela n'allait jamais plus loin! Peu importe ce que les gens pensaient de tout cela, ce n'était que des histoire! Elle ne touchait quasiment QUE pour se nourrir.

Elle n'avait pas changé, pas beaucoup et Charlie aurait du s'en douter. Il la connaissait et aurait du se douter qu'elle n'aimerait pas qu'il provoque le destin et apparaisse un soir sans crier garde. Voilà, elle était un peu énervée. Énervée aussi par le fait qu'il la voit dans ce cadre qui n'était pas le sien. Trop riche, trop grand, trop doré... Elle était une femme simple. Une femme simple qui s'était laissé séduire par la facilité, oui. Avec Henry elle n'avait rien à faire, pas même à l'aimer. Elle levait le petit doigt et tout était nickel. Elle mangeait quand elle le désirait. Avait ce qu'elle voulait : robes, sacs, chaussures, bijoux et même lunettes de soleil! Tant de choses inutiles finalement mais qui lui permettaient de se changer les idées. Qu'est-ce qu'elle pouvait dépenser en ligne! Pourtant, avant, elle n'aimait pas spécialement les fringues, les chaussures et tout le bordel. Elle était normale. Mettait des jeans, des jolies robes à l'occasion mais rien d’extravagant. Elle savait se mettre en valeur sans pour autant avoir besoin de porter des vêtements de marque.
La chambre dans laquelle elle emmenait d'ailleurs Charlie maintenant ne lui ressemblait pas du tout. Là encore, trop grand, trop riche... Ce qui lui ressemblait était sa salle-cercueil. Elle était la seule à en avoir la clé et elle l'avait aménagé comme elle l'aurait aménagé quand elle était humaine. Le lit qui s'y trouvait était un lit deux places certes mais en pin, tout simple, joli. Il n'y avait rien au mur et les lumières qu'elle avait choisit étaient très claires. Sur sa table de chevet assortie au lit se trouvait un radio-réveil et quelques photos posées en vrac. Photos qu'elle regardait tous les matins en se couchant et qu'elle regardait pendant de très longues minutes. Certains avaient des peluches. Elle avait des photos de sa vie passée. Seuls souvenirs qu'elle avait de ce bonheur disparu.
Maintenant, c'était différent, elle avait retrouvé son cher et tendre mais il manquait encore un personnage important qu'elle ne pourrait malheureusement jamais retrouver.

Elle avait donc mené Charlie à l'étage dans sa chambre en le précédent et lui jetant un regard noir. Le regard que seule une épouse peut lancer à son mari en cas d'agacement Extrême! Ce regard qui signifiait : Maintenant suis moi et tais toi! C'était ce qu'il avait fait mais il ne s'était plus tut une fois arrivé à bon port.
Elle n'avait pas spécialement envie non plus de s'étendre sur le sujet Henry mais... Il lui demandait et même si sa question semblait plus rhétorique qu'autre chose, il fallait absolument qu'elle lui réponde quelque chose! C'est là qu'elle se rendit compte que oui... Elle avait très certainement honte de sa façon de vivre. ▬ C'est juste, Henry... C'est plus facile comme ça. Oui, quelque chose comme ça. Elle ne voulait pas en dire plus. Aller plus loin dans les explications. De toute façon, elle ne trompait pas Charlie. Pas à proprement parler. Elle ne couchait pas avec Henry, ne l'embrassait pas non plus. Là où il pourrait éventuellement penser qu'elle le trompait c'était parce qu'elle vivait avec un autre homme et partageait en quelque sorte son intimité de tous les jours.

De toute façon, la suite de la discussion allait être bien plus compliquée. Oui, ils s'aimaient. Pourquoi ne pas se retrouver complètement alors? Cela ne lui semblait pas une bonne idée même si elle en rêvait.
Une mauvaise idée car il était humain et elle immortelle. Qu'arriverait il quand il mourrait? Comment ferait elle sans lui? Elle l'avait fait les dernières années mais on avait bien vu ce que ça avait donné. Elle était restée tout d'abord cloîtrée dans une grotte pour ensuite finir chez un riche vieux bonhomme... Mouais, super. Vivre sans lui c'était nul mais maintenant elle semblait avoir retrouvé un certain équilibre. Certain... ▬ Ce n'est pas aussi simple. Et non malheureusement. Quand elle le regardait elle voyait leur fils. Ses magnifiques yeux brillants... Elle lui en voulait encore. S'en voulait aussi et pourtant elle désirait être dans ses bras. Plus que tout. Le pourrait elle vraiment? Elle n'en savait rien. Elle avait si peur de le perdre, de lui faire du mal sans le vouloir. En fait elle était terrorisée par la situation dans laquelle ils étaient. ▬ Moi non plus Charlie mais je ne sais pas si on peut réellement y arriver. Je suis une vampire maintenant, toi un humain... Et si je te blessais? Ou... Si ce qu'on avait vécu nous empêchait d'être heureux encore tous les deux? Tout à coup elle pensa encore à Kyle et se demanda ce que lui pourrait bien penser de tout cela? C'était simple, il voudrait que ses parents soient à nouveau ensemble, qu'ils s'aiment et pensent à lui. Qu'ils ne soient plus triste. Objectivement c'était ce qu'il pensait. Subjectivement il pourrait être très en colère contre ses parents. Pensant qu'ils l'avaient complètement laissé tombé et qu'ils n'avaient pas su le protéger. Qu'ils ne méritaient pas d'être heureux et encore moins heureux ensemble!
Elle ne savait plus "qui" écouter... Elle regardait Charlie l'air complètement perdue, triste et pourtant tellement amoureuse.

Une mauvaise idée d’apparaître comme ça sans prévenir? Oui, absolument. Charlie le savait avant même de sortir de son appartement et avant même de prendre concrètement la décision de provoquer ce face à face. Pourtant, malgré cela, l’écossais était un soldat. Il avait été entraîné à aller au devant des choses. À foncer tête baissée lorsqu’il ne le voulait pas et, même, tout particulièrement lorsqu’il ne le voulait pas. Cette conversation devait avoir lieu et, à son avis, elle devait avoir lieu maintenant. Pendant sept ans, Neilina avait la possibilité de se manifester et elle ne l’avait pas fait. Précipiter ce face à face était la seule chose qui assurait à Charlie ne pas attendre un autre sept ans avant que quelque chose se passe.
Également conscient que le sujet Henry ou l’électricien – terme qu’allait probablement utiliser Charlie à l’avenir puisqu’il l’appréciait beaucoup plus que le prénom de ce type – était une pente glissante qui pouvait s’avérer fatale, le brun n’ajouta rien une fois l’explication donnée. Se contentant de ravaler ses paroles vaseuses et ronchonneuses, suivant docilement sa femme jusqu’à cette chambre toute aussi impersonnelle que le reste de cette maison qui était juste beaucoup trop… trop. Trop, était le seul adjectif qui lui venait en tête à ce sujet là.

Pas aussi simple? L’ancien James Bond accusa le coup ramenant les yeux vers le sol. Évidemment que ce n’était pas aussi simple. Il y avait un historique si lourd de conséquence derrière tout ça. Si Neilina n’était pas complètement disparue cette nuit-là, il en était tout autrement pour leur fils. Survivre à son enfant était un drame qu’aucun parent ne devrait vivre, mais ce n’était pas arrivé qu’à eux, pas vrai? D’autres avant eu avaient perdu un enfant et avaient su s’en relever. Honorable pensée à laquelle Charlie songeait à peine dans les faits. Dans les faits, oui, c’était aussi simple. Du moins était-ce ce en quoi il voulait croire. Rien que pour une fois, il voulait croire en la simplicité. Il suffisait qu’elle soit là et lui aussi pour les choses s’emboîtent d’elles-mêmes. Pourquoi ça ne pouvait pas être aussi simple au moins une fois? Il fut un temps où ça l’était. Pourquoi pas maintenant? Rien qu’un instant lui suffisait…
Pour ce qui était de la possibilité de le blesser, l’écossais eut un léger bouffement de rire à demi retenu. Si elle avait peur de le blesser, il était implicite que ce ne serait pas un geste volontaire à la différence de gens et d’êtres surnaturels qui avaient eu cette volonté constamment au courant de sa vie. Le fait que, malgré tout, il soit encore de ce monde était en soit une preuve qu’il saurait faire face à une éventuelle « perte de contrôle » ou autre débordement involontaire. Et si ce qu’ils avaient vécu les empêchait d’être à nouveau heureux ensemble? C’était un risque, Charlie ne pouvait le nier, cependant, il avait une certitude. Ce serait encore pire de ne pas être avec elle. Ça, il l’avait expérimenté pendant des années. Depuis l’instant où elle était réapparue, c’était comme s’il s’était senti renaître. Puis, évidemment, il y avait Kyle, clairement sous-entendu dans ce « ce qu’on avait vécu. » Lui dire que le spectre leur fils était apparu à l’une de ses relations – qui était une nécromancienne – pour les séparer était sans doute une mauvaise idée. Savoir que leur fils ne reposait pas vraiment en paix, n’était pas un fardeau qu’il désirait lui mettre sur les épaules, mais n’arrivait-il pas à trouver le repos parce que ses parents ne s’étaient pas encore affrontés. Étant donné qu’il avait clairement énoncé sa mère à Pandora – autrement comment aurait-elle pu dire qu’il était marié et père de famille – Charlie s’était dit que c’était pour que ceci se produise enfin. Que ses parents aient ce face à face, cette discussion sur la possibilité qu’ils avaient de construire à nouveau quelque chose ensemble. C’était peut-être gros de dire que Charlie le faisait pour Kyle, mais il y avait tout de même une part de vérité dans cette affirmation.

▬ Et qu’est-ce que ça change que tu vives la nuit, que tu boives du sang et que tu sois cinquante fois plus forte que moi?

Franchissant les pas qui les séparaient, le grand brun encadra le visage de sa belle avec ses mains, leur chaleur contrastant atrocement avec la fraîcheur de sa peau à elle.

▬ Y’a une raison au fait que je n’ai pas été sobre pendant toute une année et au fait que je suis encore à moitié une loque aujourd’hui… je peux pas vivre sans toi.

Survivre, il avait été en mesure de le faire durant toutes ces années, mais vivre? Non, il en avait été incapable.

Pourquoi les choses pouvaient elles pas être simples? Pourquoi ne pouvait elle pas vivre une magnifique histoire de Mormons à la Edward et Bella?! Ah oui, parce que eux, c'étaient des pecnots! Non, plus sérieusement, elle aurait aimé que les choses soient simples... Qu'elle ne soit jamais "morte" ou non... Que Kyle ne soit jamais mort. Si ils n'avaient pas perdu leur fils alors tout serait simple. Ils seraient ensemble et peu importe qu'elle soit une vampire. Elle serait comme elle l'avait été, une bonne mère, aimante et à l'écoute de son enfant. Une mère un peu poule. Elle serait elle et peu importe qu'elle se nourrisse de sang humain, rien que d'avoir son fils avec elle l'aurait rendue plus humaine que n'importe qu'elle autre femme sur terre. Mais là... Elle avait assisté à la mort de son fils. A côté de ça la transformation en vampire n'était qu'une merveilleuse partie de plaisir. Son petit amour avait été sauvagement sacrifié sur l'autel de... La connerie. La cruauté, la débilité... L'horreur. Elle n'avait jamais ressenti de lien entre elle et son créateur, on comprendra bien pourquoi.
Il était effectivement préférable qu'elle ne sache pas que Kyle n'était pas en paix... Dans son esprit son petit trésor allait bien. Il était heureux. Peut être pas au top du top car ses parents n'étaient plus ensemble mais ils s'aimaient et peu importe où ils se trouvaient l'un par rapport à l'autre, cet amour devait suffire à mettre leur fils en paix. Dans son esprit en tout cas. Elle avait tendance à ne pas vouloir être heureuse suite à ce qu'elle avait vécu mais si elle était malheureuse, il était hors de question que son bébé le soit aussi. Charlie faisait donc bien de ne rien dire. Elle n'aurait pas supporté de le savoir et même si cela avait pu lui permettre de revenir plus vite avec Charlie, le choix n'aurait pas réellement été sien. Elle l'aurait fait plus vite uniquement pour le bien du repos de son enfant. Pas parce qu'elle le voulait.

Ne vous méprenez pas. Être avec Charlie était ce qu'elle désirait le plus au monde maintenant mais cela l'effrayait au plus haut point. Elle était d'ailleurs intérieurement ravie de le voir jaloux face à ce pauvre Henry dont il n'avait absolument rien à craindre! C'était un gentil pépé autoritaire avec son personnel de maison et à l'époque avec ses employés d'entreprise mais ici... C'était une crème dont elle se servait pour survivre. Avec des moyens matériels supérieur à ceux de Charlie oui, mais bon, était-ce bien nécessaire? Maintenant qu'il était là... Elle n'en voyait plus trop l'utilité non. Charlie pouvait lui suffire amplement. Elle n'avait jamais été très matérialiste mais le fait d'avoir ce qu'elle voulait l'avait peut être un peu pourrie. Disons qu'elle compensait sa solitude en achetant encore et encore.

Elle n'avait pas vraiment pensé au fait qu'il était chasseur et qu'il pouvait bien se défendre si il le voulait. Ce dont elle avait surtout peur était d'être attirée par son sang tout en étant attirée par son physique. Elle ne savait pas si elle pourrait s'arrêter. Elle le faisait avec Henry mais avait bien moins envie de lui qu'elle ne pouvait avoir envie de son Charlie. Son seul et unique compagnon depuis toujours. Son charmant soldat. Si jamais elle le dévorait?! Que ferait elle? Elle n'aurait plus qu'à se présenter au soleil pour qu'il achève ses souffrances ou alors elle se forcerait à souffrir dans la douleur de la perte, sachant pertinemment que tout ça était de sa faute.
Elle détestait se prendre la tête de cette manière mais elle ne pouvait pas s'empêcher de voir le mal partout, tout le temps et ce dès qu'il s'agissait de son bien aimé. Elle avait tant à lui répondre à ce qu'il venait de dire. Qu'est-ce que ça pouvait faire tout ça?! Mais tant de choses si négatives et malheureuses! Mais il y avait aussi cette possibilité de ne plus réfléchir et de se laisser aller. De vivre leur amour comme des gens normaux. Pour vivre il faut savoir se laisser aller, lâcher du mou. Elle en était capable 10 ans auparavant mais aujourd'hui? L'amour était le même, peut être éventuellement plus fort encore mais il y avait aussi la colère et la tristesse. Les non-dits. Mais il ne fallait pas qu'elle oublie qu'ils venaient à peine de se retrouver et qu'ils parlaient sérieusement pour la première fois.
▬ Ça change tout... Et rien... Elle était si perdue. Elle le laissa s'approcher d'elle et lui prendre le visage. Elle n'évita pas son regard, du moins pas au départ. C'était plus fort qu'elle. Elle devait s'habituer à nouveau à regarder celui qu'elle aimait dans les yeux.
Elle l'écouta. Il y avait aussi une raison au fait qu'elle avait tant changé. Une raison au fait qu'elle vivait chez un riche et vieux bonhomme. Des raisons au fait qu'elle ne rit et ne sourit plus jamais... Il avait raison mais... "Mais" c'était ce mot qui l'empêchait de réellement avancer.
Elle sentait maintenant les larmes monter, c'est là que son regard dévia.
▬ Je ne veux plus non plus être loin de toi mais je me demande si tout ça est réellement possible. Si le destin ne va pas encore nous séparer... Pourtant le destin les avait fait se retrouver non? Il y avait tant de signes qui lui disait de partir et tant d'autres signes accompagnés à ses plus forts sentiments qui lui disaient de rester. Elle ne savait pas où aller les les larmes qu'elle avait senti venir coulaient maintenant doucement le long de son visage de porcelaine.
Elle rêvait d'être heureuse mais ne savait pas du tout si elle le pouvait encore.▬ Je suis tellement perdue Charlie. Je t'aime comme au premier jour et pourtant je ne sais pas si être avec toi est une bonne idée. Il y a trop de "si" et de "mai" qui entrent en compte. Je suis perdue et terrorisée. Est-ce qu'il avait aussi peur qu'elle? Elle espérait le savoir. Elle avait toujours eu besoin de son épaule solide et peu importe si aujourd’hui"hui elle avait la force physique d'on ne sait combien d'hommes, elle avait encore et toujours besoin de lui pour la soutenir.

Déçu? Oui, il était difficile de cacher que Charlie ne l’était pas un peu. Pourquoi la vie ne se passait pas comme un film? Ça ce moment là, dans un film, Neilina aurait bondi de joie en assurant que rien d’autre qu’eux ne comptaient, ils auraient eu leur happy end et voilà le travail! Mais non, dans la vie, ça ne se passait pas comme ça. Dans la vie, l’espoir que tout aille soudainement bien n’était pas aussi facile à avoir. Le fait qu’ils se soient retrouvés n’effaçait pas tout ce qui était arrivé. Ça ne faisait pas disparaître les années de mensonges, ni les regrets et ça ne faisait pas revivre leur fils. Pourtant, Charlie voulait y croire. Comme toutes ces fois où il avait perdu des hommes, où il avait cru ne pas pouvoir accomplir sa mission. Chaque fois, il s’était relevé, décidé à aller jusqu’au bout quoi qu’il en coûte. Le brun estimait, que dans la situation actuelle, il devait se relever deux fois plutôt qu’une. Il n’était pas question d’un pays, d’un gouvernement, de gens qu’il n’avait jamais vu… Il s’agissait de la femme qu’il aimait, il s’agissait de lui. Cette fois-ci bien plus que les autres, l’écossais ne pouvait pas abandonner. Et il était déçu que Neilina ne partage pas son sentiment. Elle semblait ne voir que le pire. Charlie, lui, voulait se raccrocher au meilleur. Ils avaient une chance d’être ensemble à nouveau. N’était-ce pas tout ce qui comptait? Ils auraient tout le temps de se questionner plus tard. Ils auraient tout le temps d’affronter les problèmes quand ils viendraient. C’était sans aucun doute la formation de Charlie qui le faisait penser ainsi, mais les accros viendraient d’eux-mêmes. Il était inutile de perdre de l’énergie sur ce qui pouvait éventuellement arriver. C’était préférable de toute la conserver pour ce qui était sûr de se produire, non?

▬ Je ne veux plus non plus être loin de toi mais je me demande si tout ça est réellement possible. Si le destin ne va pas encore nous séparer...
▬ Ça, on ne le saura jamais à moins d’essayer.

Foncer tête baissée quoi qu’il arrive. Voilà ce que Charlie avait toujours fait et encore maintenant, c’était ce qu’il comptait fait. De toute manière, qu’avaient-ils encore à perdre? Leur maison, leur fils… leur vie, avait pris fin depuis des années et même si Charlie était encore vivait contrairement à sa femme, il se considérait tout aussi mort qu’elle l’était. Une ligne de pensée qu’il avait déjà avant d’apprendre qu’elle était encore plus ou moins de ce monde. Voir les larmes de sang prendre naissance dans ses yeux lui serra le cœur et davantage lorsqu’elles se mirent à couler, pourtant, il était hors de question qu’il abandonne. Juste s’assoir et accepter la fatalité, il l’avait fait pendant sept ans. Maintenant qu’elle était là, qu’il pouvait la serrer dans ses bras, il était hors de question qu’il refasse la même erreur juste parce qu’ils ne pouvaient pas savoir si ça allait marcher. La première fois, le savaient-ils? Non et pourtant ça ne les avait pas empêché de tenter le coup.
Chassant tendrement les larmes de sang qui roulaient sur les joues de sa bien aimée, le grand brun ramena doucement la tête de Neilina vers lui pour mettre fin à ce regard fuyant. Elle devait voir sa détermination. Comprendre, qu’il n’avait pas l’intention d’abandonner de si tôt.

▬ Des si et des mais, il y en a constamment Neili. Ce n’est pas parce que c’est nous, pas parce que tu es un vampire. Il y en a tout le temps. C’est normal d’avoir peur, mais ce n’est pas une raison pour fuir.

Il vint poser sa tête contre son torse, ramenant ensuite ses bras autour d’elle. Il était si bon de pouvoir la sentir contre lui. Qu’elle soit froide comme la mort et que son cœur ne batte pas était certes déroutant, mais si c’était là le prix à payer pour pouvoir être à nouveau avec elle, alors tant pis, il s’y ferait.

▬ Je sais que je t’ai menti, que je t’ai blessée. Ce que j’ai fait est impardonnable… ça nous a coûté un fils… et je ne te demande pas de me pardonner.

Il ne voulait pas de son pardon de toute manière. Il ne voulait pas se l’accorder lui-même, il ne le désirait pas plus de sa part à elle. Non, ce qu’il avait fait était réellement impardonnable…

▬ Mais passer encore sept ans sans toi sous prétexte que c’est incertain, non. Oui, ça peut être dangereux et un millier de choses peuvent arriver, mais si tu m’aimes et que je t’aime, il faut au moins essayer. On sera ensemble mon cœur et pour moi c’est tout ce qui compte.

Il fallait avouer que depuis qu'elle était vampire elle avait perdu toute sa joie. Cela était du aux circonstances plus que tragiques de sa transformation, évidemment, mais avec la vie elle avait aussi perdu la joie, l'envie, la motivation. Elle s'était laissée "voguer" sans plus se poser de question depuis qu'Eric l'avait trouvée et avant cela elle ne savait plus vraiment. Elle était restée terrée, terrorisée, perdue. Elle aurait du retrouver de sa motivation en se rapprochant de Charlie mais même pas. Elle avait vécue trop longtemps en ressassant les malheurs du passé pour réellement profiter du moment présent. Moment heureux qui plus est puisque son mari lui déclarait à nouveau sa flamme et n'était pas près à la laisser filer.
Elle n'était pas le genre de femme à aimer qu'on lui courre après. Elle ne faisait d'ailleurs pas tout cela pour ça, elle ne faisait que s'écouter, avec tous les côtés péjoratifs que cette expression peut avoir. Réfléchir, encore et encore... Elle n'était plus capable que de cela. Si seulement elle avait trouvé le moyen de faire taire son cerveau abimé. Là... Elle lui aurait sauté dans les bras, l'aurait embrassé, l'aurait laissé la faire tourner en la prenant dans ses bras. Elle aurait pleuré de bonheur et non de tristesse comme maintenant. Si elle avait été plus lucide elle se serait détestée pour toutes ces réactions idiotes qu'elle avait maintenant. Pourquoi avait elle perdu cette fougue et cette envie de vivre ou de survivre qui avait été sienne durant toutes ces années où elle avait été humaine?! La vue de Charlie aurait du lui redonner de l'espoir. Il l'avait fait, un peu et puis elle s'était remise à réfléchir.
Au départ elle ne faisait que lui en vouloir et ensuite, sous l'effet de la joie passagère elle s'était mise à espérer pour ensuite douter et avoir peur. Quelle idiote! Si elle le perdait à nouveau et par sa faute elle s'en mordrait les doigts à jamais.
Elle l'écouta et compris tant bien que mal qu'il avait raison. Enfin... En principe elle compris mais à proprement parler... Ce n'était pas gagné.
Évidemment qu'ils ne le sauraient jamais si ils n'essayaient pas! Elle le savait bien au fond d'elle! C'était comme si elle voulait rester misérable toute sa (sur)vie. Quelle idiote mais quelle idiote vraiment! Mais le spectre de son fils ne cessait de planer au dessus d'elle. Que voulait il? Si seulement elle l'avait su. Vivre avec les fantômes du passé n'était pas autorisé mais oublier son fils? JAMAIS. Le problème était qu'elle n'avait pas encore compris que faire son deuil ne signifiait pas oublier son enfant disparu. Juste le laisser partir en paix, penser à lui en des souvenirs joyeux. La culpabilité la rongeait tellement.
▬ Je sais, je sais! Oui, et non. Mais oui... Puis non. Idiote et trouillarde.
▬ Je ne fuis pas... Je ne sais pas ce que je dois faire... Je t'en veux encore. Je m'en veux aussi tellement... On a pas le droit d'être heureux. Pas après ce que Kyle a vécu. Ils n'auraient jamais d'autres enfants non et ne seraient pas des parents qui refont des enfants après la tragique perte du premier. Mais ils pourraient être heureux en se remettant tous les deux. Est-ce qu'ils en avaient le droit? C'était leur faute ce qui était arrivé à Kyle. La faute de Charlie pour avoir envoyé ce fou chez eux et sa faute à elle puisqu'elle n'était pas parvenue à le sauver et à écarter le danger. Trop de questions, encore et toujours...
Elle ne s'éloigna pas de Charlie quand il s'approcha encore d'elle, la prenant dans ses bras. Elle y était d'ailleurs bien, sentant mieux son odeur qu'elle connaissait. Une odeur dont elle avait besoin vivante pour évoluer, une odeur qui maintenant lui donnait faim et lui permettait dans un même temps de se détendre quelque peu.
▬ J'ai peur de mal faire... Peur d'oublier... J'en sais rien... C'est plus fort que moi. Je veux être avec toi mais la morale me dit qu'on a pas le droit d'être heureux... La morale... Elle lâcha un rire nerveux.
▬ La morale... Je suis une vampire, je me sers d'un humain tous les jours pour me nourrir sans parler de mon train de vie de princesse qui lui coûte les yeux de la tête, je l'utilise et je parle de morale... Non mais vraiment! Ce qu'il ne fallait pas entendre! Heureusement, elle en était consciente. Tout cela était presque ridicule même si ses craintes étaient fondées. Ce dont elle avait besoin, c'était qu'on la rassure. Charlie avait toujours très bien su faire ça.
Elle se serra plus contre lui et lui embrassa doucement le cou. Bien dans ses bras mais toujours loin, quelque part, plutôt pommée.

La serrer un peu plus fort. Sur le coup, c’était tout ce à quoi le brun avait pu songer. La serrer un peu plus fort, comme pour l’empêcher de partir. Il n’avait absolument pas la force nécessaire pour l’empêcher de quoi que ce soit, il en était parfaitement conscient, mais c’était tout de même ce qu’il cherchait à faire avec ce geste quelque peu désespéré. Ils n’avaient pas le droit au bonheur? Lui-même avait adopté cette méthode, il ne pouvait donc pas reprocher l’autodestruction malsaine dans laquelle s’était plongée Neilina pour faire face à la situation. Cependant, depuis cet épisode avec Pandora et l’apparition du fantôme de Kyle, l’écossais s’était mis à penser différemment. Et si justement, tout l’intérêt était d’être heureux? D’être ensemble malgré tout. C’était clairement ce que désirait leur fils. Voir ses parents réunis et affronter sa perte ensemble. Mais comment le dire à Neili sans faire référence à l’esprit de Kyle qui continuait de tourner autour d’eux? S’il avait pu choisir, Charlie aurait préféré ne jamais savoir que leur fils n’était pas en paix. Il était, par conséquent, hors de question qu’il afflige sa femme de ce poids.

Lutant quelque peu contre le serrement qu’il avait à la gorge en constatant à quel point il avait détruit la seule femme qu’il n’ait jamais aimée, le brun laissa plusieurs secondes filées dans le silence, sentant ce baiser dans son cou. Sa peau en frissonna non seulement à cause de ce contact qu’il croyait perdu dans un passé qu’il n’aurait plus jamais l’occasion de connaître, mais également parce que les lèvres de Neilina étaient froides. Suite à ce geste, il ferma les yeux et prit une profonde inspiration, inaudible pour le commun des mortels, mais assurément entendu par la vampire qu’il tenait entre ses bras.

▬ Ce n’est pas oublier que d’y faire face ensemble.

Il avait à peine murmuré, mais encore une fois, il savait que Neilina l’avait parfaitement entendu. Et puis, il l’avait déjà dit, en sachant qu’elle était encore de ce monde, qu’elle était là et qu’il avait l’opportunité d’être de nouveau avec qu’elle, l’idée de continuer à vivre sans elle était complètement dérisoire. Folle, stupide. Il ne voulait même pas y penser. Pendant toutes ces années, la seule chose qu’il avait faite avait été de boire, chasser et chercher en ces femmes qui croisaient sa route celle qu’il croyait ne plus jamais revoir. Parfois elles avaient son sourire, son rire, ou ses yeux. Parfois elles avaient une ou deux de ses mimiques, mais rien ne l’égalait jamais. Elle avait tout et elle était tout pour lui. C’était quelque chose qu’il avait dû apprendre à ses dépends. Il pouvait vivre sans l’armée, sans le MI-6. À l’époque, il croyait que ces institutions donnaient un sens à sa vie, mais maintenant il savait que ce n’était pas le cas. Ce n’était pas vraiment son « devoir » qui faisait de lui ce qu’il était, mais bel et bien sa famille. Et il avait fallut qu’il la détruise pour le comprendre… Pathétique, pas vrai?

▬ Devoir vivre sans lui… c’est pas déjà suffisant?

À son avis, ça l’était. Pouvoir être à nouveau avec la femme qu’il aimait n’effaçait pas la perte douloureuse de leur enfant.

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